Turnover entreprise : quand bien payer ne suffit plus à fidéliser
Le turnover en entreprise coûte cher : entre 1 et 2 fois le salaire annuel du salarié remplacé. Pour le réduire, il faut agir sur le management, la reconnaissance, la culture d’équipe et la formation, bien plus que sur la rémunération.
Vous augmentez les salaires, proposez des primes, soignez vos locaux… et pourtant, vos collaborateurs continuent de partir. Si ce scénario vous semble familier, vous n’êtes pas seul, le turnover en entreprise n’a jamais été aussi élevé. Selon la Dares et l’Insee, environ 18 % des salariés du secteur privé changent d’employeur chaque année. En 2023, seuls 81,7 % des salariés étaient encore dans la même entreprise un an plus tard, un niveau de mobilité supérieur à celui d’avant la crise sanitaire (source : Dares / Insee, 2024). Et contrairement à une idée répandue, le salaire n’est plus le principal levier de fidélisation. L’argent attire, mais ne retient pas. Comprendre pourquoi est devenu un enjeu stratégique, car chaque départ coûte cher ; souvent bien plus qu’on ne l’imagine.
Comprendre le phénomène : qu’est-ce que le turnover en entreprise ?
Le turnover désigne le taux de renouvellement des effectifs au sein d’une organisation sur une période donnée. 💡 Une formule simple : (Nombre de départs sur l’année ÷ effectif moyen) × 100
Un taux de 5 à 10 % est considéré comme sain. Au-delà de 15 %, la stabilité de l’équipe est fragilisée.
Le turnover reflète à la fois la santé sociale et la performance économique d’une entreprise. « Trop bas », il peut révéler une inertie ou un manque d’innovation. « Trop haut », il entraîne désorganisation, perte de compétences, coûts supplémentaires et atteinte à la marque employeur.
💡 À savoir Selon une étude Gallup (“Employee Turnover Is Preventable but Often Ignored”, 2023), 42 % des collaborateurs qui ont quitté volontairement leur entreprise estiment que leur manager ou leur organisation aurait pu faire quelque chose pour les retenir. Autrement dit, le turnover n’est pas une fatalité : il résulte souvent d’un désalignement entre les attentes des collaborateurs et les réponses de l’entreprise.
Un phénomène en hausse dans les PME
La Dares observe depuis 2022 une hausse structurelle des mobilités professionnelles, particulièrement marquée dans les PME de 10 à 250 salariés.
Les raisons :
un marché de l’emploi tendu, favorable aux candidats,
une recherche accrue de sens et d’autonomie,
une moindre tolérance aux environnements managériaux jugés “toxiques”.
Selon l’étude « Attirer les talents dans les PME et les ETI » publiée par Bpifrance Le Lab, près d’1 dirigeant de PME sur 2 reconnaît avoir du mal à retenir ses collaborateurs, surtout dans les fonctions techniques, commerciales ou administratives.
Dans les très petites entreprises, l’impact est encore plus fort : le départ d’un salarié expérimenté peut bouleverser l’organisation et ralentir l’activité pendant plusieurs mois.
Les causes principales du turnover ne sont pas celles que l’on croit
1. L’écart entre promesse et réalité
Les salariés d’aujourd’hui ne se contentent plus d’un emploi stable. Ils recherchent une expérience professionnelle cohérente avec leurs valeurs et leur équilibre de vie.Un poste attractif sur le papier peut vite décevoir si l’ambiance, la charge de travail ou le management ne suivent pas.
L’Apec souligne que près d’1 cadre sur 2 quitte son poste faute de perspectives d’évolution. Dans les PME, cette contrainte structurelle est forte : peu de niveaux hiérarchiques, promotions rares. Mais il existe des alternatives (formation, élargissement de missions, participation à des projets transverses).
4. L’équilibre de vie
Le rapport au travail a profondément changé. Le télétravail, la souplesse des horaires et la prise en compte du temps personnel ne sont plus des avantages, mais des attentes. Depuis la crise sanitaire, beaucoup de salariés placent désormais la stabilité et la qualité de vie devant la rémunération ou la promotion. Concrètement, cette recherche d’équilibre passe par des choses simples : pouvoir déconnecter à une heure raisonnable, éviter les réunions tardives, organiser sa journée avec plus d’autonomie ou travailler à distance quelques jours par semaine. Les entreprises qui respectent ces besoins gagnent en loyauté et en motivation. Celles qui s’y refusent risquent au contraire de voir partir leurs talents les plus engagés.
Le coût réel du turnover pour une entreprise
Le turnover a un impact direct sur la rentabilité, et pas uniquement sur le climat social.
1. Coût du départ
Chaque départ engendre :
indemnités éventuelles,
désorganisation temporaire,
perte de productivité,
surcharge des équipes restantes.
Coût du recrutement
Publication d’annonce, tri des candidatures, entretiens, intégration… Selon l’Apec, le coût moyen d’un recrutement dépasse 7 000 €, sans garantie de succès.
Coût de la formation et de la montée en compétences
Un salarié met en moyenne 6 à 9 mois à être pleinement opérationnel. Pendant ce temps, la performance est inférieure à celle d’un collaborateur expérimenté.
4. Coût immatériel du turnover
Ces effets indirects peuvent peser davantage que les coûts visibles. Le coût d’un départ ne se limite pas au recrutement. Il faut y ajouter la désorganisation, la perte de savoir-faire et la période d’intégration. > En France, plusieurs estimations situent ce coût global entre 6 et 9 mois de salaire, selon le niveau de poste et la durée nécessaire pour retrouver la pleine productivité (sources : Elevo, Randstad France, Qualisocial, 2024). > Pour les postes stratégiques ou très spécialisés, ce coût peut dépasser 1 année de salaire.
Le salaire reste essentiel, mais il ne suffit plus à garantir la fidélité. Aujourd’hui, les salariés restent là où ils se sentent utiles, reconnus et écoutés. Selon Gallup (2024), seuls 15 % des collaborateurs se déclarent “pleinement engagés” dans leur travail. Ce chiffre, pourtant stable depuis dix ans, explique à lui seul la hausse du turnover.
La clé n’est donc pas de payer plus, mais de créer plus de valeur relationnelle et collective. Pour les dirigeants de PME, cela passe par des leviers simples mais exigeants.
1. Mesurer avant d’agir : connaître son taux de turnover et ses signaux faibles
Beaucoup d’entreprises ne suivent pas leur turnover avec rigueur. Pourtant, la mesure est le point de départ de toute action efficace. Comment le calculer ? (Nombre de départs sur la période ÷ effectif moyen) × 100
💡 À suivre aussi :
Taux de départs volontaires (démissions) : indicateur clé de la fidélisation.
Ancienneté moyenne : si elle chute, c’est un signal d’alerte.
Raisons de départ : à identifier via des entretiens de sortie structurés.
Repenser l’onboarding : le premier mois compte double
L’onboarding n’est donc pas une formalité : c’est un moment décisif pour sécuriser la relation employeur-salarié dès les premiers mois.
Dans une PME, un bon onboarding repose sur :
un accueil humain et préparé (poste prêt, planning clair) ;
un tuteur désigné ;
des feedbacks fréquents ;
un moment convivial d’équipe.
3. Valoriser le management de proximité
Le rôle du manager est central. C’est souvent lui qui retient, ou fait fuir, les collaborateurs. Les entreprises à management bienveillant et responsabilisant affichent un turnover inférieur à la moyenne.
Les pratiques qui fonctionnent :
entretiens réguliers (des feedbacks, pas seulement des évaluations) ;
reconnaissance des efforts, pas seulement des résultats ;
autonomie encadrée : dire “comment”, pas “quoi faire” ;
droit à l’erreur et apprentissage collectif.
En résumé : le manager n’est plus un contrôleur, c’est un facilitateur.
4. Développer les compétences pour retenir les talents
Un salarié qui apprend reste plus longtemps. Selon LinkedIn Learning : 94 % des collaborateurs restent plus longtemps dans une entreprise qui investit dans leur développement.
Leviers accessibles aux PME :
mini-formations internes entre pairs ;
formations en ligne (MOOC, OPCO) ;
missions transverses pour sortir de la routine.
Former ne coûte pas forcément cher. Le coût d’un départ reste, lui, beaucoup plus élevé.
5. Stopper le turnover en misant sur la reconnaissance
La reconnaissance est un puissant antidote au turnover. Elle peut être :
financière (prime, participation, intéressement),
symbolique (remerciement, visibilité, confiance),
collective (mise en avant d’une équipe).
Selon l’étude Great Place to Work 2024, 72 % des salariés qui se sentent reconnus se projettent encore dans l’entreprise à 3 ans, contre seulement 28 % des autres.
6. Renforcer la culture d’entreprise et le sentiment d’appartenance
Les collaborateurs quittent rarement une entreprise dans laquelle ils se reconnaissent. Les leviers les plus efficaces ne sont pas forcément matériels :
donner de la visibilité sur le projet de l’entreprise,
partager les réussites collectives,
célébrer les étapes clés,
créer des rituels simples (réunions d’équipe, cafés mensuels).
7. Aligner fidélisation et performance économique
Un turnover maîtrisé n’est pas seulement une question RH, c’est un investissement rentable. Réduire le turnover de 5 % peut améliorer le résultat net de 25 à 95 %, selon les secteurs.
En pratique :
calculer le coût global du turnover (départs + recrutements + intégrations) ;
fixer un objectif de réduction mesurable (ex. : –10 % sur un an) ;
suivre les gains de productivité et de stabilité.
8. Donner du sens au travail, même dans les PME
Les jeunes générations accordent une place centrale au sens. Mais donner du sens ne signifie pas “changer le monde” : cela peut être aussi simple que d’expliquer à quoi sert le travail de chacun.
un artisan qui montre à son apprenti le résultat final chez le client ;
un service client qui partage les retours positifs des utilisateurs ;
un dirigeant qui explique pourquoi une décision stratégique est prise.
Ces gestes concrets renforcent la fierté d’appartenance et réduisent mécaniquement le turnover.
En conclusion, le coût du départ est toujours plus élevé que le coût de la fidélité
Le turnover entreprise est un indicateur économique avant d’être RH. Bien payer ne suffit plus à retenir : il faut écouter, reconnaître, impliquer. Une stratégie de fidélisation réussie repose sur trois piliers : la clarté (des attentes et du management), la cohérence (entre discours et actes), la considération (humaine, pas uniquement salariale). Réduire le turnover, ce n’est pas dépenser plus, c’est investir mieux.
FAQ : turnover en entreprise
1. Quel est un bon taux de turnover en PME ? Entre 5 et 10 % selon les secteurs. Au-delà de 15 %, il devient préoccupant.
2. Comment calculer le coût du turnover ? Additionnez les coûts directs (recrutement, formation, départ) et indirects (perte de savoir-faire, productivité, cohésion).
3. Quelles sont les causes principales du turnover ? Manque de reconnaissance, management inadapté, absence de perspectives, désalignement valeurs/mission.
4. Le télétravail réduit-il le turnover ? Oui, lorsqu’il est encadré et choisi. Il améliore l’équilibre de vie et la satisfaction, mais ne remplace pas la culture d’équipe.
5. Comment agir sans budget supplémentaire ? Renforcer le feedback, valoriser les réussites, clarifier les objectifs, et impliquer les équipes dans les décisions.
Article rédigé par : Aurore Massonnaud – Communication-Marketing
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